Il n’en finit plus, il dépasse. L’homme s’étire comme une tige vers le ciel ou plutôt vers les cintres du théâtre. Une silhouette en marche, un comédien à fleur de peau, inspiré, tremblant, vivant. Philippe Fenwick nous fait partager son rêve russe au Théâtre national de Nice. Il nous embarque dans cette histoire qui, de Brest à Vladivostok, conte les espoirs, les déboires, les joies et les chagrins d’un poète fou. Fou de musique et d’utopie.
« Transsibérien je suis » ou bien je ne suis rien tant il est vrai que la mémoire est têtue. Philippe Fenwick a quelque chose à voir, à régler, avec la Russie. Ce spectacle donne à voir un écheveau dont notre imaginaire doit tirer les fils pour suivre le chemin, son chemin. Les images se bousculent, les paroles s’entrecroisent. Un régal lorsque les corps deviennent instruments de musique, lorsque les numéros de voltige soulignent la difficulté d’être, d’exister au paradis des saltimbanques, en Dramatie.
On songe à Giacometti en voyant cet éternel adolescent longiligne perdu dans un no man’s land qui symbolise les arcanes de l’administration. Parcours non fléché vers des subventions aléatoires, rendez-vous manqués, déceptions, colères rentrées. Il ne parviendra sans doute pas à gagner Vladivostok ce chanteur transformiste, cet artiste de cabaret aux allures de clown triste mais il nous aura fait voyager le temps d’une représentation vibrante, acidulée et poivrée. En compagnie d’une troupe singulièrement talentueuse.
A l’affiche jusqu’à samedi soir. A ne pas manquer.
« Transsibérien je suis faut-il à tout prix réaliser ses rêves?« . De et avec Philippe Fenwick. Jusqu’au 30 avril. Théâtre National de Nice. Salle Pierre Brasseur. Tél. 04 93 13 90 90

Il y a finalement assez peu de rencontres marquantes dans une vie de journaliste. L’après-midi que j’ai passé en compagnie de Martin Gray il y a deux ans chez lui, dans son mas de Biot, fait partie de ces moments d’exception inscrits dans la mémoire et dans la chair. Car l’homme était vif, étonnant, exemplaire. Je parle de chair pour dire combien les mots qu’il m’a confiés ce jour-là sont allés au-delà d’une interview de routine. Approcher un tel personnage, a fortiori lorsque son histoire fait écho à la vôtre, laisse forcément des traces. Je dirais plutôt des sillons, des coulées de sang imaginaires que l’on a envie de suivre jusqu’à l’origine du mal afin de tenter de remonter le cours de la vie arrachée à ceux que l’on aurait aimés si l’on avait pu les connaître.





Complexe, intellectuel, inventif et profond. L’art vérité suit forcément les élans du cœur et de l’esprit du plasticien. Chez Gérald Thupinier qui (s’) expose à la galerie Christian Depardieu la peinture ne se livre qu’avec parcimonie, à son image. Et, comme il le dit, « chaque œuvre appartient à celui qui la regarde ».