À l’occasion du 350e anniversaire de la mort du maître, le Rijksmuseum présente pour la première fois de son histoire une exposition rétrospective de toutes les peintures, gravures et dessins de Rembrandt, issus de sa propre collection. Un événement artistique car certaines pièces ne sont montrées qu’exceptionnellement en raison de leur fragilité, notamment leur extrême sensibilité à la lumière. Ainsi, à côté des chefs d’œuvre du peintre que chacun connaît comme « La fiance juive » ou « Le syndic de la guilde des drapiers », pouvons-nous découvrir un graphisme passionnant, étonnant et réellement moderne dans certains dessins accrochés aux cimaises jusqu’au 10 juin. Il faut donc se hâter de faire un petit tour dans cette ville magique pour ne pas passer à côté de cette opportunité unique.
Rembrandt, malgré les ors du 17e siècle néerlandais, ne resta jamais cantonné à la représentation de la beauté, de ses atours, de ses richesses. Sa maîtrise absolue, fabuleuse, novatrice, du clair obscur servit tout au contraire la mise en abîme de l’homme, la description des vicissitudes de la vie, l’angoisse de la mort. Ses scènes de genre campent des gens de peu, des travailleurs, une femme pensive, un vieil homme plongé dans l’obscurité mais dont une chandelle nous révèle la fascination pour la lecture.
La nature n’échappe pas à l’acuité du regard de Rembrandt même si le peintre, portraitiste avant tout, a réalisé peu de paysages. « Les Trois Arbres » notamment témoignent d’un graphisme époustouflant. Dans cette magnifique gravure à l’eau-forte et pointe sèche on sent la caresse du vent, on perçoit le danger d’un ciel d’orage et l’on entend le bruissement des feuilles. Toute une dramaturgie surgie de l’observation attentive d’un coin de campagne familier. De la même façon, dans chaque œuvre Rembrandt se fait conteur et photographe bien avant l’heure. Il donne à voir une histoire et ses portraits captent les rides de l’âme sous les traits du visage. Ainsi en est-il de cette femme (voir photo ci-dessous) qui, mesure la force de ses richesses, exprime le profond contentement d’être ainsi parée de perles, bijoux et dentelles. Elle ne doute de rien ou bien elle confond l’avoir et l’être, pourrait-on dire aujourd’hui. Splendide témoignage de certains aspects de la nature humaine. Rembrandt génie du graphisme, de la peinture et de l’étude de ses semblables.
« Tout Rembrandt ». Jusqu’au 10 juin. Rijksmuseum. Amsterdam