Raymond Depardon, le regard de la pensée à la galerie Lympia à Nice

IMG_4198« Dieu a donné deux ailes : la simplicité et la pureté ». Je ne sais si Raymond Depardon est croyant ou agnostique. Mais dans tous les cas les deux qualités ici louées par Honoré de Balzac ne cessent de favoriser son envol vers une grandeur que révèlent à tout instant son humanité et son humilité.

Issu de la ruralité dans ce qu’elle a de plus émouvant et authentique, Raymond Depardon ne se départit jamais de l’ancrage qui est à l’origine de son parcours. Lui qui a traversé les océans, les déserts et les folies du monde, son appareil photo en bandoulière et chevillé au corps, reste finalement l’homme du souvenir et d’une certaine nostalgie. C’est ce mélange de sens de l’actualité et de réflexion intemporelle qui donne leur dimension à ses clichés superbes, profonds, universels. L’ici et maintenant restent la clé, dessinent les tribulations d’un homme profondément attaché au témoignage mais ses photographies échappent à la datation et à la géographie. Le désert vu par Depardon, qu’il se situe au Tchad, en Mauritanie ou en Erythrée c’est l’immensité face à l’humain qui marche, le vide et le plein, la rudesse et l’espoir d’une oasis.  « Le désert est un endroit où il faut perdre du temps, un endroit qui se mérite » dit-il.

DER1986006W00050/20A-21L’enfermement, qu’il soit maison d’arrêt ou asile, c’est la prison intérieure, l’angoisse qui ronge, le délire qui effraie, la dépression qui isole. Voilà ce que l’on ressent devant ces images captées dans les hôpitaux psychiatriques italiens. « Un  jour -raconte Raymond Depardon- je fus surpris de ne plus avoir aucune émotion en faisant mes photos… J’étais devenu trop lucide. Je n’avais plus peur des fous. j’ai arrêté aussitôt. Je suis rentré à Paris et je n’ai plus jamais fait de photos à San Clemente » (1).

Il fallait donc pour préserver intact le regard de la pensée que l’affect y soit, que jamais la technique photographique ne parvienne à supplanter l’œil imbibé d’émotion. L’exposition actuellement présentée à la galerie Lympia à Nice sous l’intitulé « Traverser » nous guide dans l’œuvre multiple d’un photographe unique en son genre. Témoin de son temps, enraciné dans la France profonde où se situait la ferme familiale, voyageur infatigable, reporter sur les champs de douleur, amoureux de Marguerite Duras dont la tombe porte les mêmes initiales que sa maman, Marthe Depardon. Une exposition essentielle.

(1) Située au centre de la lagune de Venise, l’île de San Clemente passa dans les mains des Autrichiens qui y firent bâtir l’Asile central des femmes de la Vénétie en 1880, lequel fut fermé en 1992. Avant la fermeture de l’asile d’aliénés, Raymond Depardon y a tourné un documentaire, en 1980, »San Clemente »

Jusqu’au 16 septembre. Raymond Depardon Traverser. Galerie Lympia. 2 quai Entrecasteaux. Nice

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(1)Située au centre de la lagune de Venise, l’île de San Clemente passa dans les mains des Autrichiens qui y firent bâtir l’Asile central des femmes de la Vénétie en 1880, lequel fut fermé en 1992. Avant la fermeture de l’asile d’aliénés, Raymond Depardon y a tourné un documentaire, en 1980, »San Clemente »

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