On le dit post conceptuel, burlesque, folklorique, éboueur de Duchamp… Thierry Lagalla s’impose comme un furieux tchatcheur. Que ce soit au milieu de la galerie Espace à Vendre, à Nice, où il expose son « Esperiença plata » et emmêle les fils en décrivant par le menu les œuvres aux cimaises ou dans ses tableaux où les mots font mouche. Quel régal ce plat de saucisses où une chipolata tranchée parodie la fameuses phrase de Nietzsche: « Ce qui ne nous tue pas rend plus fort oui, mais ça esquinte un peu »! Pour rester dans la philo, rendons hommage à une jolie miniature bucolique intitulée « L’hêtre et l’étang ». On y plongerait.
Mais revenons à l’essentiel, « l’esperiença plata », titre de cette nouvelle expo. Lagalla prend le parti de la sole. Deux faces pour un poisson, une même réalité, mince et pourtant tangible. Solea Solea, le terme, ici redoublé, désignait chez les Romains la sandale. Une infime épaisseur séparant l’être du sol, l’engageant à revoir le réel selon l’exaspération de ses neurones. Entre le pied et le cerveau, ce petit bout de corde ou de cuir pour s’envoler vers l’inattendu, le polysémique, le jeu de mots. Et l’artiste, sans le savoir, chante à tue-tête « o sole mio…
Il le dit. Il veut faire de toute œuvre « l’environnement immédiat » de son existence. Et son existence ne cesse de se balancer d’une facétie à l’autre en lançant les vocables comme un feu d’artifice dans ses « ciels » (« oh pardon! mes « cieux ») monochromés. Paysages du midi à la sauce Lagalla. Alors faut-il véritablement adopter sa grille de lecture foisonnante pour recevoir ses travaux? Tout dépend. Certains tableaux captent l’attention sans que l’on ait besoin de pirouettes linguistiques. Magie de l’ambivalence, de la couleur. Car, Lagalla reste un peintre et la peinture le suit partout même lorsqu’il taille la route avec sa fameuse « Vanité de voyage ».